Affaire Sarah Halimi
Le désarroi d'un justiciable
Les tribunaux français l’ont décidé : le meurtrier de Sarah Halimi ne sera pas jugé.
Les faits sont pourtant établis et ne sont contestés par personne : cette dame âgée, éduquée et inoffensive, a été la victime de la barbarie dans la forme même où elle est prêchée sur le sol français dans les mosquées islamistes, en particulier lorsqu’il s’agit de s’en prendre aux juifs; elle a été torturée et défenestrée, mise à mort selon un rituel écrit, donc prémédité, versets coraniques et incantations compris. Mais la justice française ne jugera pas l’affaire.
La justice ignore le justiciable : il n’a qu’à bien se tenir.
Il y a déjà eu des dysfonctionnements de la justice en France, mais ils ont généralement fait l’objet de débats sur les moyens d’améliorer les choses, de reprendre le dossier, de changer la loi, les procédures, voire les magistrats chargés du dossier. Mais là, on n’en parle pas.
Alors, parlons-en.
Une justice inconsistante
Je ne m’attarderai pas sur la technicité juridique du dossier. Cela n’a aucune importance, puisque la justice a décidé que la justice ne sera pas rendue. Et c’est cela qui est grave. Mais deux mots tout de même.
Le motif invoqué : l’abolition du discernement de l’assassin. Justement ! Voici ce que dit le Petit Robert au mot assassin :
assassin : n.m. (par l’italien assassis , origine arabe hachchâchî «buveur de haschisch», nom des fidèles du Vieux de la Montagne qui rançonnaient les voyageurs.) 1° Celui qui commet un meurtre avec préméditation ou guet-apens. …
La consommation de stupéfiants pour libérer les pulsions meurtrières n’est pas une découverte ! Elle n’est contraire ni à la préméditation d’un assassinat – c’est même étymologiquement un pléonasme : assassin = haschischi – ni au Jihad d’où nous vient le mot même d’assassin. Les guerriers des premières conquêtes arabes y avaient d’ailleurs abondamment recours. Les psychotropes ne forment donc pas une circonstance atténuante, particulièrement dans un contexte islamique, mais justement une circonstance aggravante puisque l’assassin qui se drogue mime intentionnellement le rituel des premiers jihadistes. Car en somme, ne pas condamner ce meurtrier c’est dire qu’en France un crime contre un juif reste impuni si les modalités du meurtre sont conformes à la pratique jihadiste : avec consommation préalable de haschisch.
On se demandait si l’islam était compatible avec la République. Là, c’est la loi qui serait compatible avec la Sharia, ou alors ce seraient nos juges qui, pour d’obscures raisons, interpréteraient nos lois sous l’angle de la Sharia.
De nombreux articles, tous plus brillants les uns que les autres, ont montré la stupidité et la mauvaise foi de ce jugement qui sera une tache de honte sur la face de la France, de sa justice, et des français que nous sommes. Des textes de haut vol sur tous les fronts, philosophiques, juridiques, psychiatriques, sociaux. Mais je suis tout-de-même peiné de voir que nous autres juifs sommes obligés d’élaborer avec innocence et candeur des raisonnements si brillants pour ne même pas obtenir pour nos victimes ce que d’autres arguments imbéciles, avancés par des coupables de surcroît, obtiennent si facilement des tribunaux français. Je me demande même si cette intelligence à laquelle on nous contraint, et dans laquelle nous nous engouffrons, ne nous marginalise pas encore plus, ne nous piège pas encore plus dans l’antisémitisme : les juifs, des intellos et des financiers, … Les hordes provocantes et intimidantes usent d’arguments primaires avec beaucoup plus d’efficacité que nous ! Aussi, pour faire bref et pour ne pas trop me faire de peine, je ne citerai que deux des nombreux textes brillants qui abordent le fond :
Tribune Juive : Claude Bloch, psychiatre. Lettre ouverte à Madame la Ministre de la Justice.
La règle du jeu (Revue de Philosophie) :Affaire Sarah Halimi : une terrible, et étrange, défaite
Mais le silence assourdissant de la justice française, des médias, des représentations, est persistant. Or, la rupture du dialogue est une invitation à la violence : refuser de juger, bafouer la justice due aux victimes et à leurs proches, c’est instiller dans la société les prémisses de la violence.
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En France, au XXIè Siècle, on tue des juifs impunément ?
Comment ne pas relier les choses : Sarah Halimi était juive. Je n’aurais jamais pensé pouvoir dire cela de la justice française : mais oui, sincèrement, j’ai beau me forcer, je n’arrive pas à dissocier ces deux choses. La justice due à cette victime est bafouée, et cette victime est juive : ces deux choses sont liées, je le crois intimement. Je n’arrive pas à imaginer le même verdict si le meurtrier avait été juif et sa victime musulmane – oublions un instant qu’un tel acte est étranger aux valeurs juives – .
Oui, la France est devenue lentement mais sûrement, subrepticement depuis quelques décennies, un pays où l’antisémitisme a pénétré tous les pores de la société : non seulement les islamistes ou de si nombreux musulmans auxquels on s’empresse de trouver des circonstances atténuantes, non seulement tous les extrémismes, mais aussi la petite bourgeoisie de province, la bourgeoisie bobo parisienne, la gauche bien pensante, les aristocrates, les pouvoirs, les contre pouvoirs et tous les opportunismes. Aujourd’hui, c’est un fait : l’injustice faite par les tribunaux français à un justiciable juif ne mérite pas de débat. En France, le juif est devenu sans intérêt ni valeur, inoffensif et abandonné, on en dispose et on en abuse à sa guise. L’injustice faite par les tribunaux français à Sarah Halimi n’offusque ni l’appareil judiciaire, ni les magistrats, ni les autorités : circulez, il n’y a rien à voir. Oui, on a vu en France plus de remous autour des violences faites aux animaux, et de la nécessité de changer les choses. Mais ici, les seules argumentations à peu près consistantes auxquelles nous avons droit font état du rapport de forces entre les territoires perdus de la république et les autorités. Bref, une lâcheté de plus dans la trahison du peuple par son élite. Et un refus de juger.
Mon Dieu, que nous sommes descendus bas ! Je me souviens encore du temps où, confronté à des situations inédites, je me disais que si cela empirait le peuple se soulèverait. Les premiers meurtres de juifs sur le sol français me paraissaient tellement incongrus dans ce pays qui se présente tellement comme civilisé, instruit, humaniste et universel. Mais, non : la France institutionnelle ressemble toujours à elle-même, prompte à tirer profit de tout, à se compromettre pour n’importe quoi.
L’abdication des tribunaux français à juger le meurtrier de Sarah Halimi, et le silence qui s’est ensuivi, ressemblent à un sacrifice rituel fait pour apaiser la barbarie, comme on sacrifiait, chez les primitifs, des vierges et des enfants aux dieux.
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La justice ou la violence
Le citoyen ne peut être désarmé que si la justice le considère comme un justiciable, non comme un bouc émissaire ou une tête à claques, juste bon pour un mur de cons ou pour subir la barbarie des uns et le devoir de se taire devant l’injustice des autres. Oui, je le dis : à un magistrat qui n’est pas révolté par l’injustice faite à une victime dont le meurtre n’est pas jugé, je conteste le droit de siéger dans un tribunal ; à un magistrat qui se laisse intimider par la barbarie je conteste le droit de siéger dans un tribunal ; à un magistrat qui juge selon des critères politiques, je conteste le droit de juger, et je n’ai que faire de ses verdicts. À un magistrat qui ne se considère pas comme l’obligé du justiciable mais comme son oppresseur, je conteste le droit de juger.
Un magistrat compétent est révolté par l’injustice. Toute autre posture instaurerait la violence. Mais nos magistrats savent que les juifs ne prendront pas les armes. Non, les juifs s’opposent à la violence parce qu’ils ne veulent pas exister par leur capacité de nuisance mais par leur présence bienfaitrice. Non, tout le monde le sait, y compris les magistrats français : les juifs finiront par partir.
Et l’on croira s’être attiré la bienveillance de l’hydre barbare, au nom du sacrifice fait aux frais des juifs, dont on pensera même s’être débarrassé à bon compte.
Ineptie.
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Ce qu’en disait déjà le Talmud
Traité Sanhédrin, page 109b :
ארבע דייני היו בסדום שקראי ושקרוראי זייפי ומצלי דינא דמחי ליה לאיתתא דחברי‘ ומפלא ליה אמרי ליה יהבה ניהליה דניעברה ניהליך דפסיק ליה לאודנא דחמרא דחבריה אמרו ליה הבה ניהליה עד דקדחא דפדע ליה לחבריה אמרי ליה הב ליה אגרא דשקל לך דמא
דעבר במברא יהיב ארבעה זוזי דעבר במיא יהיב תמני זוזי זימנא חדא אתא ההוא כובס איקלע להתם אמרו ליה הב ד‘ זוזי אמר להו אנא במיא עברי אמרו ליה א“כ הב תמניא דעברת במיא לא יהיב פדיוהו אתא לקמיה דדיינא א“ל הב ליה אגרא דשקיל לך דמא ותמניא זוזי דעברת במיא
אליעזר עבד אברהם איתרמי התם פדיוהי אתא לקמיה דיינא א“ל הב ליה אגרא דשקל לך דמא שקל גללא פדיוהי איהו לדיינא אמר מאי האי א“ל אגרא דנפק לי מינך הב ניהליה להאי וזוזי דידי כדקיימי קיימי
Il y avait quatre juges à Sodome nommés selon leurs actes : Shakraï (menteur), Shakruraï (menteur invétéré), Zayfaï (travestisseur) et Matzleï Dina (pervertisseur de jugement). Ils ordonnèrent les lois suivantes : si un homme battait la femme de son prochain en causant une fausse couche, ils disaient au mari : donne ta femme à son agresseur jusqu’à ce qu’elle soit enceinte à nouveau pour toi. Si quelqu’un coupait l’oreille de l’âne de son prochain, ils disaient [au propriétaire] donne lui ton âne jusqu’à ce que l’oreille repousse. Si un homme blessait son prochain, ils disaient à la victime : paie un dommage à ton agresseur car il t’a fait une saignée.
Ils établirent une règle : celui qui traverse le pont au dessus d’une rivière doit payer quatre pièces, et celui qui traverse à la nage doit payer huit pièces. Un jour, un blanchisseur arriva. Les habitants de Sodome lui dirent : paie quatre pièces pour la traversée du pont. Il répondit : j’ai traversé à la nage. Ils lui dirent : dans ce cas, paie huit pièces, puisque tu as traversé à la nage. Il ne paya pas, et ils le frappèrent. Il se présenta devant le juge pour obtenir un dédommagement. Le juge lui dit : paie aux agresseurs une amende, puisqu’ils t’ont fait une saignée, en plus des huit pièces pour avoir traversé la rivière à la nage.
Eliezer, le serviteur d’Abraham, passait par là, et ils le blessèrent. Il se présenta devant le juge pour obtenir un dédommagement. Le juge lui dit : paie une amende aux assaillants, puisqu’ils t’ont fait une saignée. Eliezer prit une pierre et blessa le juge. Le juge s’exclama : qu’est-ce que cela ? Eliezer lui répondit : l’amende que tu me dois pour t’avoir blessé, paie la à mon agresseur.
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Juger, condamner le meurtrier, revenir au bon sens
À quoi bon tout notre formalisme juridique s’il ne s’élève même pas au niveau du bon sens ? Quant à cette propension à qualifier de déséquilibrés tous les délinquants dès lors qu’ils sont musulmans, c’est une offense faite aux déséquilibrés comme aux musulmans.
Dans notre civilisation où l’on communique plus qu’on ne se parle, il est urgent de rétablir le dialogue en commençant par juger et condamner l’assassin de Sarah Halimi.
Et revoir d’urgence l’article L122-1 du code pénal, ou clarifier son interprétation, qui exonère sans discernement quiconque a, par sa volonté ou non, son discernement aboli.